Le projet de loi de finances pour 2011 a finalement été adopté le 15 décembre par un ultime vote à l'Assemblée nationale et au Sénat. Un budget placé sous le signe de la nécessité de réduire le déficit annuel exorbitant (+150 miliards en 2010). Au programme: réduction des dépenses publiques et augmentation des recettes fiscales, via de nouvelles taxes, des hausses d'impôts et des suppressions de niches fiscales. Revue de détail.
Au moins deux milliards de hausse d'impôts pour les particuliers
Majoration d'un point de la tranche d'imposition la plus élevée de l'impôt sur le revenu, qui passe de 40 à 41%. Cette hausse, dite "Contribution solidarité vieillesse", servira à financer les retraites. Elle s'appliquera aux 340.000 foyers fiscaux déclarant plus de 69.783 euros annuels et ne sera pas prise en compte dans le bouclier fiscal. Son rendement est de 230 millions d'euros.
Suppression de l'avantage fiscal aux mariés, pacsés et divorcés de l'année. Aujourd'hui, les couples qui se marient ou se pacsent peuvent remplir, pour l'année de leur union, trois déclarations de revenus: une individuelle chacun, pour la période avant les noces, et une commune, pour le reste de l'année. L'an prochain, les nouveaux couples devront choisir: soit ils remplissent une déclaration chacun pour toute l'année, soit ils en transmettent une commune au fisc. Les divorcés seront eux contraints de rédiger deux déclarations distinctes pour toute l'année. La suppression de cet avantage rapportera 500 millions d'euros à compter de 2012.
Suppression de l'abattement de 15% de cotisations sociales pour les particuliers-employeurs. Ce dispositif a bénéficié en 2009 à 750.000 employeurs, soit plus d'un tiers du total des employeurs, représentant un manque à gagner pour l'Etat de 280 millions d'euros. La disparition de cet avantage fiscal doit permettre d'économiser environ 460 millions d'euros en 2011, selon le ministre du Budget François Baroin.
Suppression du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt immobilier . Ce dispositif, qui coûte entre 1 et 3 milliards d'euros, sera remplacé par un nouveau prêt à taux zéro renforcé.
Réduction d'ISF en cas d'investissement direct ou indirect dans une PME abaissé de 75% à 50%. Cette réduction d'impôt ne pourra pas excéder 45 000 euros par ménage contre 50 000 euros actuellement.
Coup de rabot de 10% sur une vingtaine de niches fiscales (souscriptions au capital de Sofipeche ou de Sofica, travaux de conservation d'objets mobiliers classés, avantage Scellier, investissements réalisés outre-mer, etc.) et plafonnement de la somme maximale qu'un contribuable peut déduire de l'impôt à 18.000 euros (contre 20 000 actuellement) et 6% du revenu imposable (contre 8% en 2010).
Hausse de la taxation des revenus du capital (+1 point à 19% du taux de prélèvement forfaitaire libératoire sur les dividendes d'actions, les intérêts de produits de placement à taux fixe, les plus-values mobilières et immobilières et les plus-values de cession d'actions et d'obligations); hausse de la taxation des retraites chapeaux (les rentes comprises entre 500 et 1000 euros par mois subiront une contribution sociale de 7%, celles au-delà de 1000 euros seront taxées à 14%). Toutes ces mesures, destinées à financées les retraites, rapporteront 640 millions d'euros en 2011 selon Bercy.
Soumission à l'impôt sur le revenu des dommages et intérêts de plus d'un million d'euros. Cet amendement est dit "Tapie" en référence en référence à l'homme d'affaires qui s'est vu attribuer 45 millions de préjudice moral par un tribunal arbitral en juillet 2008 dans le litige l'opposant au Crédit Lyonnais sur la vente d'Adidas.
Par ailleurs, les étrangers sans papiers et à faible ressources devront désormais payer un paieront un droit d'entrée de trente euros pour bénéficier de soins médicaux. Enfin, la hausse envisagée du prix des amendes de stationnement a été renvoyée à un décret ultérieur. François Baroin table sur une hausse de 15 à 20 euros d'ici la fin de l'année.
Hausse de 9 milliards d'euros de la taxation des entreprises
Rabot du crédit d'impôt recherche: la réduction d'impôt de 5% pour les dépenses de recherche excédant 100 millions d'euros est maintenue, mais l'avantage fiscal des entreprises qui investissent pour la première fois dans la recherche sera réduit de 50% à 40% la première année, et de 40% à 35% la deuxième.
Le calcul des allègements de charges sur les bas salaires (jusqu'à 1,6 fois le smic), jusqu'ici calculées mensuellement, va être annualisé. Ce qui signifie concrètement que les treizièmes mois et les primes seront désormais intégrés dans le calcul. Cette mesure, destinée à financer les retraites, représente une économie annuelle de 2 milliards d'euros.
La contribution sociale sur les stock-options payée par l'employeur passera de 10% à 14%. Bercy en attend 70 millions d'euros en 2011.
La réforme de la taxe professionnelle, qui s'est traduite par des économies de 7 milliards d'euros pour les entreprises en 2010, va être mieux encadrée : c'est désormais le chiffre d'affaires consolidé d'une entreprise sera pris en compte pour calculer la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE), qui a remplacé la taxe professionnelle, afin d'éviter que les entreprises multiplient les filiales afin de passer sous le seuil de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires pour pouvoir bénéficier de dégrèvements.
Une ponction de 245 millions d'euros aura lieu sur les offices HLM pour financer l'Agence nationale de rénovation urbaine (Anru). Une ponction d'environ 100 millions sera également opérée sur les ressources de la société du Grand Paris pour financer l'Anru.
Création d'une taxe sur la publicité en ligne, dite "taxe Google", de 1% pour les entreprises basées en France qui achèteront des espaces publicitaires sur internet. Selon le rapporteur de la commission des Finances du Sénat, l'UMP Philippe Marini, elle devrait rapporter environ 20 millions d'euros par an. Cette taxe devait s'appliquer à compter du 1er janvier. Face au tollé de protestation des acteurs de l'économie numérique, Bercy a annoncé un moratoire de six mois. L'avenir cette taxe est donc incertain.
Toujours dans le domaine de l'économie numérique, la TVA sur les offres triple play sera portée à 19,6% pour la totalité de la facture, contre 50% actuellement (l'autre moitié était taxée au taux réduit de 5,5%). Cette mesure devrait rapporter 1,1 milliard d'euros par an. La plupart des fournisseurs d'accès internet ont d'ores et déjà indiqué qu'ils allaient répercuter ce coût sur le client final, en augmentant le prix de leurs abonnements.
La patronne du Medef Laurence Parisot a fait les comptes: selon elle, ces mesures se traduiront par une hausse "considérable" de 9 milliards d'euros de la taxation des entreprises.
François GRENIER
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